Comme la première fois, j'avais laissé les commandes à Isabelle. Sa réserve de parchemins truqués en poche, elle était sortie de la Salle Commune juste au moment ou deux autres élèves entraient, le timing avait été parfait. Je l'avais suivi en courant le plus vite possible et, comme prévu, elle avait laissé tomber un des faux parchemins. Je m'étais retourné une seconde, les deux Gryffondor s'étaient arrêtées et lisaient le papiers. J'étais sûr après ça qu'on allait les retrouver devant la Salle sur Demande. Soit elles avaient deviné et elles s'y rendraient d'elles-mêmes, soit, comme je le pensais plutôt, elles allaient simplement nous suivre. Je ne m'en souciais pas plus pour le moment et me concentrais de nouveau sur ma course, il ne fallait pas que je perde Isa de vue parce que c'était elle qui savait où et comment trouver cette Salle. Elle me l'avait bien dit tout à l'heure mais à vrai dire, à part une histoire de tapisserie, je n'avais rien retenu.

Nous nous arrêtâmes dans un couloir et je devinais que nous étions au bon endroit en voyant l'expression enjouée d'Isabelle. A ma grande surprise, nous étions seuls. Pas de Serpentard ni de Gryffondor à l'horizon. Peut-être que nous avions réellement une chance de gagner finalement. Et tant mieux, j'aurais trouvé injuste qu'elles profitent de notre réussite. J'étais tout excité, j'étais certain qu'on était à deux doigts d'avoir un nouvel indice - ou peut-être même une réponse ! Je rendis son sourire à Isabelle et la pris par la main. Elle saisit ensuite le parchemin et se mit à marcher d'un air décidé. Les secondes s’égrainaient et rien ne se passait. Une légère anxiété m'envahit. -C'est ça, c'est forcément ça, murmurai-je en regardant Isa faire des aller-retours devant le mur. Et la seconde d'après, une porte apparut. Je me tournai vers Isabelle avec un énorme sourire. -T'es trop forte ! Tout impatient, je me jetai sur la porte avec elle et nous entrâmes.

Après quelques pas dans la pièce, je me départis de mon sourire. Il y avait trop d'objets dans cette Salle. Beaucoup trop. Je jetai un oeil sur le parchemin, pour voir si quelque chose de nouveau y était écrit mais ce ne fut pas le cas. J'étais désemparé. Premièrement c'était vraiment le bordel dans cette Salle et deuxièmement - ce qui était beaucoup plus problématique - on ne savait pas quoi chercher. Je me tournai de nouveau vers Isabelle et vis qu'elle s'était un peu éloignée. En fait, elle se dirigeait vers un miroir. Et en y regardant de plus près, je remarquais qu'il renvoyait l'image d'un aigle. Je m'approchai. Oui c'était bien un aigle. La référence me sauta immédiatement aux yeux. -Un aigle... comme dans Serdaigle ? demandai-je à haute voix, autant pour Isabelle que pour moi-même. je l'avoue, j'étais un peu perdu. Si c'était de Serdaigle qu'il s'agissait, que fallait-il que nous fassions ? Qu'on trouve un objet de Serdaigle ? Genre, le diadème de Rowena ? Non. Ça semblait trop simple. -Mince. Qu'est-ce qu'on doit faire ? On retourne à la Salle Commune ? Peut-être qu'un nouvel indice nous attendait là-bas ? Honnêtement, je n'en avais aucune idée. Comme toujours, je comptais sur les petites cellules grises d'Isabelle.

Un mouvement à l'entrée attira mon attention et je tournai la tête vers la porte. Mon sourire s'évanouit d'un coup et je m'empressai de mettre les mains en l'air. -Oh oh doucement, on se calme ! fis-je en faisant face aux deux baguettes des Gryffondor. -Isa ! Je crois qu'on a un problème. Je me disais aussi que c'était bizarre qu'elles aient abandonné si facilement...

Après réflexion, James et moi avions décidé de mettre notre plan à exécution. Chacun de notre côté nous avions arpenté la pièce en quête de hiboux et nous avions sélectionnés ceux qui nous paraissaient les plus obéissants pour éviter d'avoir trop de problèmes en les transportant. Je n'étais pas spécialement fan de ces oiseaux et je n'avais pas du tout confiance. Je ne savais même pas ce qui m'avait prit de vouloir les utiliser, c'était loin d'être mon meilleur plan mais pour me défense, il faut dire que je n'avais pas vraiment eu le temps de cogiter à tout ça. La seule chose qui m'obsédait c'était le temps: on devait faire vite. Plus on restait loin de tous les autres et plus nos chances de gagner s'amenuisaient. J'imagine que James et moi étions d'accord sur ce point, même si nous n'arrivions pas à récupérer ce foutu parchemin, nous nous devions de garder un œil sur les autres et de leur mettre un maximum de bâtons dans les roues. -C'est bon, je crois que là, on en a assez, lançai-je à James en refermant une dernière cage.

En fait, notre plan de départ était de lâcher ces oiseaux à l'intérieur pour les faire sortir de leur repère, mais après un bref détour par la Tour d'Astronomie, on s'était vite rendus compte que le passage était trop étroit pour nous permettre de les introduire dans le clan ennemi. On était restés un instant perplexe. Bon, il fallait encore trouver autre chose. -Merde, tout ça pour ça. Bon qu'est-ce qu'on fait ? Mais nous n'avions plus de temps à perdre, notre seule chance était de foncer pour les intercepter avant qu'ils ne sortent. C'était donc les bras chargés de ces bestioles hululantes que l'on se dirigea vers la Salle Commune des Serdaigle. Et là, surprise, le couloir était vide. Je soupirai et tendis l'oreille. -J'entends rien. A tous les coups ils sont sortis. Je me tournai vers James d'un air dépité. Est-ce qu'on avait fait tout ça pour rien ? On avait quand même pas couru partout pour se retrouver largués par les autres ! Mon esprit se mit à chauffer. Je rageai et fis s'envoler tous les piafs sur mes épaules. Après tout, on avait plus besoin d'eux maintenant et je n'avais aucune envie de les rapporter. Je passai une main dans mes cheveux avant de l'enfoncer dans l'une de mes poches. Comment on avait pu perdre aussi vite ? J'étais carrément dégouté. On avait même pas eu le temps de commencer à participer à cette chasse au trésor...

-Mais attends, elles sont où les deux Gryffondor ? J'espérais qu'elles n'avaient pas récupérées le parchemin, je préférais encore voir les Serdaigle gagner ! Je me rassurais à l'idée que  - de ce que j'avais vu -  la jeune Serdaigle était très maligne et compétitive. Elle avait sans doute trouvé un moyen de garder ce parchemin pour elle. Et en plus, elle avait un sacré avantage sur les autres, puisqu'elle était à Serdaigle, et que tout le monde sait que c'est la maison qui abrite le plus d'intellos. -J'en reviens pas qu'on se soit fait doubler si facilement... râlai-je. Puis des pas se firent entendre, je relevai la tête et n'en revins pas. C'était elle, la jeune Serdaigle qui revenait, accompagnée de son pote et... je rêvais où c'était Mei et Merida avec eux ?

Est-ce que je n'en avais pas marre que ce soit toujours Isabelle qui nous sorte des situations compliquées ? Non pas du tout. Heureusement pour moi je n'avais pas du tout d'orgueil et j'acceptais parfaitement le fait qu'elle soit beaucoup plus maligne que moi. La preuve, elle était tellement maligne qu'elle s'adressa d'abord à Merida, en jouant la carte de l'amitié, chose que je ne pouvais pas faire étant donné que je les connaissais à peine. Et puis il fallait dire qu'elle avait un sacré talent oratoire, non mais vraiment quoi, regardez-moi cette tirade, elle aurait convaincu n'importe qui ! Je me retins de sourire et baissai les bras lentement. Elle avait fait mouche, car la chinoise sembla se détendre un peu. Je me penchai vers Isabelle et chuchotai: -Alors ça c'est bien joué ! Une vraie juge en herbe ! Notre virulente interlocutrice sembla accepter le marché, mais je n'en étais pas très sûr étant donné qu'elle avait camouflé sa joie sous un tas de menaces. Est-ce qu'on allait vraiment devoir faire équipe avec elle ? Parce qu'à première vue, elle n'inspirait pas vraiment confiance. Je sortis de la Salle en passant à côté d'elle d'un air désinvolte. -Je crois qu'on a compris l'idée. Et sache que si c'est toi qui tente de nous embrouiller, on se vengera aussi, fis-je avec un sourire.

Nous nous dirigeâmes ensemble vers notre Salle Commune. Tout en marchant, je gardais un oeil sur nos deux nouvelles compagnes en me demandant si elles étaient vraiment dignes de confiance. Et j'imaginais qu'elle devait se demander la même chose de leur côté. Après tout, ce n'était pas comme si on luttait pour nos vies, c'était juste une chasse au trésor pour des points de maison, je n'avais aucune raison de me montrer méfiant envers elles. Je ralentis la cadence pour venir me placer auprès de la chinoise afin de me présenter. -Je m'appelle Eric, au fait. Et toi ?  En arrivant devant notre tableau, j'eus la surprise de voir que les deux Serpentards ne s'étaient finalement pas perdus en route. Ils étaient là, à nous attendre patiemment. Je n'eus pas le temps de réagir car Isabelle se dirigea tout de suite vers eux. Quand elle les invita à se joindre à nous je faillis protester. Pourquoi ? On était déjà assez nombreux, pourquoi s'encombrer avec deux Serpentards ? Je n'aimais pas vraiment travailler en équipe. Sans compter que jusqu'à présent, Isa et moi avions tout résolus seuls, on aurait pu aller jusqu'à la victoire en duo... Mais je respectais Isa et je savais que ses idées avaient tendance à être plus que judicieuses, alors je ne dis rien.

J'avançai devant la Salle, prêt à l'ouvrir. Je m'arrêtai avant de le faire, il fallait mettre les choses au point avec tout le monde. Me découvrant une âme de chef je lançai donc: -Juste, j'insiste sur le fait qu'on est une équipe, on a tous besoin les uns des autres. Pour ce qui est des points, je pense que quand Walter Elias sera devant le fait accompli il sera obligé de partager la récompense, donc no stress. Mais je crois que ce n'est pas le but principal, l'intérêt de tout ça reste de résoudre l'énigme du parchemin. On est tous d'accord ? Tout le monde resta silencieux, je pris ça pour une approbation. Je jetai un oeil vers Isabelle, elle souriait et semblait surexcitée à l'idée d'avancer encore un peu plus. J'ouvris donc la Salle et entrai, suivi de près par tous les autres.

La Salle était pleine de mousse. De la mousse de bain. J'en restai bouche bée. Je me mis à sourire. C'était une blague ? Oui, tout ça n'était qu'une vaste farce du directeur. C'était ridicule, il y en avait tellement que l'on n'y voyait rien. Je jetai un oeil sur mes camarades, la plupart étaient tout aussi perplexe que moi. On était censé faire quoi ? Faire disparaître toute cette mousse pour trouver un indice ? Ou alors, c'était la mousse elle-même qui constituait l'indice ? Je remarquai que l'un des deux Serpentard semblait plongé dans une intense réflexion puis tournai le regard vers Isabelle. Je reconnus ce petit air malicieux qui ne l'avait pas quitté depuis le début de "la chasse au trésor". J'attendis donc qu'elle expose son idée au groupe parce que moi, personnellement, je séchai. La Salle de bain des préfets ? Oui, ça devait sans doute être ça. En y réfléchissant, la mousse ne pouvait renvoyer qu'à cet endroit de Poudlard.

Nous étions donc repartis pour une nouvelle traversée du château et je ne pouvais m'empêcher de penser que tout collait parfaitement. Si nous n'avions pas été à Serdaigle, on aurait jamais trouvé cet indice. Et si Isa n'avait pas été là, on aurait jamais eu accès à la Salle de bain des préfets. Finalement, ça ressemblait de moins en moins à du hasard. Je veux dire que, pour la résoudre, nous étions obligés de faire des alliances entre les maison. Et bizarrement, je n'aimais pas ça, j'avais un mauvais pré-sentiment. Pré-sentiment qui se renforça quand nous entrâmes dans la majestueuse Salle de bain. Pendant un instant, j'en oubliai la chasse, en me disant que ça devait être absolument génial de prendre un bain ici, dans l'eau chaude, au milieu de l'abondante mousse. Isa avait raison, ça devait vraiment valoir le coup. Ce fut le fantôme qui me tira de mes pensées. Comme les autres fois, nous n'avions pas eu à attendre longtemps avant d'avoir un signe. Pourtant, je me serai bien passé de celui-ci. Quand il évoqua le jeune Poufsouffle, je sus immédiatement de qui il parlait. L'histoire de la magie était l'une de mes disciplines favorites et j'avais toujours attaché beaucoup d'importance à me souvenir des évènements du passé. Alors, je savais. Je savais qu'il faisait référence à Cédric Diggory. Mais je n'osais pas le dire. Je n'étais pas un lâche mais je n'étais pas du genre courageux non plus. Et connaissant les circonstances de sa mort, je n'avais pas trop envie d'aller m'aventurer dehors. Au silence qui régna pendant quelques longues secondes, je devinai que je n'étais pas le seul à avoir compris. Je déglutis et les mots sortirent tout seuls de ma bouche: -Je pense qu'on doit aller dehors, sur les pelouses.

Le trajet se fit en silence. Ce nouvel indice avait clairement plombé l'ambiance. Et moi je cogitais de plus en plus. A vrai dire, je me préparais à tomber sur un truc horrible. Peut-être que l'inondation avait été provoquée par le Mage Noir, peut-être que c'était lui qui orchestrait tout ça, et peut-être que nous, pauvres idiots, nous nous précipitions dans un piège, comme Diggory avant nous. Je serrai les doigts sur ma baguette en priant pour me tromper. Il est vrai que j'avais tendance à parfois trop réfléchir aux choses. Il y avait plus de chances pour que l'issue de tout ça soit beaucoup plus simple. En tout cas, nous n'allions pas tarder à le savoir puisque nous venions d'arriver sur les pelouses.

Un coquillage, il y avait un coquillage posé sur l'herbe. Une drôle de sensation m'envahit. Il ressemblait étrangement à quelque chose que j'avais déjà vu. Attendez une seconde... Je fis un pas en avant pour le voir plus clairement. On aurait dit le coquillage que je voyais en rêve de temps en temps. Je fronçai les sourcils. Je devais certainement me tromper, ce n'était pas possible. Un coquillage est un coquillage après tout. Je crois qu'en fait, l'angoisse me brouillait les idées. Sans compter que cette sensation de déjà-vu ne s'arrêtait pas là. Deux jeunes garçons s'étaient retrouvés dans une situation similaire auparavant, et nous savions tous comment cela s'était terminé. Le plus jeune des deux Serpentard tendit une main pour le ramasser mais mon instinct me cria de ne pas le laisser y toucher. -Non ! m'exclamai-je. -Je crois... je crois que c'est un Portoloin. Nous restâmes tous immobiles un instant. Honnêtement, j'étais à deux doigts de faire demi-tour et de m'enfuir en traînant Isabelle parce que j'étais certain que nous allions tomber dans un coup fourré. Mais quelque chose me poussa à rester, je me sentais attiré par ce coquillage, et je voulais trouver la solution de l'énigme. Après s'être tous accroupis auprès de l'objet, nous touchâmes le coquillage d'un même mouvement. Et j'avais raison, nous nous envolâmes dans les airs avant d'atterrir lourdement sur une surface dure et froide.

Le lac, nous étions sur le Lac Noir. Je me relevai avec précaution et me tournai vers Isabelle qui était tombée dans l'eau glacée. Je me précipitais vers elle mais elle fut plus réactive et ressortit immédiatement.  -Ça va ?! Elle me retourna la question et je lui signifiais que oui avant d'ajouter d'un air plus que sérieux: -Je n'aime pas ça Isa. Je ne pouvais pas en dire plus, mais je savais qu'elle comprendrait ce que je voulais dire. Encore ce Lac. Je tapai légèrement du pied sur la glace et il y eut un craquement sordide. Je savais ce que ce bruit voulait dire et à voir les têtes des autres, ils avaient compris aussi. -Oh putain... Mon épaule se mit à me lancer furieusement mais je devais rester impassible. Je soupirai en regardant autour de moi. On était trop loin du bord. On était trop nombreux. Nous n'allions jamais y arriver. J'avais eu raison depuis le début. J'allais me noyer cette fois. Mon coeur se mit à tambouriner dans ma poitrine. Tout ça n'était pas arrivé par hasard. Sans savoir pourquoi, quelque chose au fond de moi me disait que j'étais la cause de tout ça. La maison Serdaigle, le coquillage, le Lac Noir... Ça faisait trop de coïncidences. Le lien avec moi était trop évident. Et pourtant, je restais dans l'incompréhension la plus totale. Pourquoi j'aurais été au centre d'une chasse au trésor ? C'était totalement absurde.

Ma respiration s'était accélérée. Heureusement Isabelle me prit par la main et me fit revenir sur terre. Il fallait que j'arrête de délirer. Je déglutis et fis un pas vers la berge. Il y eut encore un craquement et instinctivement je fermai les yeux. -Doucement... murmurai-je. Encore un pas, puis un autre, de plus en plus vite. Ce fut plus facile d'avancer à l'aveugle. Je ne voyais plus cette eau qui me faisait si peur. Je me concentrai pour me faire le plus léger possible et me focalisai sur la chaleur de la main d'Isabelle. Quand je sentis la terre ferme sous mes pieds je lâchai un gros soupir. Nous avions réussi. J'étais tellement content que je ne remarquai la perle que lorsque Isabelle s'en saisit. Je cherchais dans mes souvenirs mais elle ne me disait rien du tout. -Non... je ne vois pas vraiment le rapport... Je fis une pause. -Tu crois que c'est un indice ? Si c'est le cas, il faudrait savoir d'où elle vient. Ou alors on attend, peut-être qu'on aura un autre signe...